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13 juin 2010 7 13 /06 /juin /2010 20:44

Il est parfois bien triste que le plus fort se serve le premier, c’est ce que nous allons voir.

C'est en Afrique. Cette année-là, la savane africaine souffrait de la pire sécheresse qui soit. Le sol brulait les pieds, même ceux des insectes, les oueds étaient à sec, même les plus fournis, les feuilles des arbres tombaient. Celles des arbres persistants aussi.

Que l’on soit homme, animal ou végétal, tout le monde souffre ces années-là. On se terre, on se replie.

La sécheresse durait depuis plusieurs semaines, lorsque les animaux décidèrent de tenir conseil sous l’arbre à palabres. Ce sera à la tombée de la nuit. Les arbres à palabres sont ces lieux où la pensée de chacun, une fois exprimée, fabrique de la sagesse. Les premières minutes passèrent à se plaindre de la chaleur et de la faim et c'est normal. On avait-là un représentant des animaux de chaque taille.

Une fourmi représentait les « tout-petits »,

une souris les « petits »

un lapin les « petits-moyens »,

un renard les « moyens »     

            et un lion les « gros ».

« Il reste bien quelques réserves de l’été dernier », c’est que dit le vieux sage. « Reste à en organiser le partage ». On débattit longtemps avant de se mettre d’accord.

Fallait-il priver les « tout-petits de manger » ?

On jugea qu’on gagnerait peu à les priver. L’estomac de la fourmi est si petit.

Fallait-il priver les « petits » ?

On jugea que là aussi, on gagnerait peu. L’estomac de la souris est à la mesure de sa taille. 

Les « petits-moyens » alors ?

Là encore, on gagnerait peu.

Personne ne proposa que l’on privât les moyens ni les gros, bien que chacun le pensât, de peur qu’on ne le mangeât. 

 

La nuit était bien avancée, une nuit sans fraicheur, lorsqu’on se mit d’accord.

Chaque jour, la fourmi se nourrira la première, puis la souris, puis le lapin, puis le renard et enfin le lion. Ainsi, chacun prélèvera ce dont il a besoin. Juste ce dont il a besoin et alors on attendra les jours meilleurs. C’était là la solution la plus juste. Commencer par le lion n‘aurait pas garanti que les plus petits mangeraient.

Et l’on fit, comme on avait dit dès le lendemain, et le lendemain encore. Chacun laissait une écuelle propre, c’est ce que l’on avait décidé, parce qu’un autre mangeait après lui.

Certes, on avait faim mais c’était plaisir que de faire cet effort pour chacun. Et le temps s’écoulait, plus doux, vers des jours meilleurs.    

 

Cela dura quelques semaines, jusqu’au jour où la fourmi se présenta, à son heure, devant l’écuelle, l’écuelle était vide. Puis vint la souris qui fit le même constat, et un peu plus tard le lapin. Vide, pas le moindre grain. Le renard, pourtant rusé, ne trouva rien non plus. Vide.

Tous, effarés, décidèrent d’aller prévenir le lion. Le lion dormait dans sa tanière, le ventre plein. Le lion avait mangé et bien mangé la pitance de chacun. Que peut-on faire contre un lion ?

 

On ne fit rien contre lui mais on fit ensemble. On chercha le moindre grain et on entassa. C'était dur mais c'était plaisir que de faire ensemble. Et on constitua, patiemment, de jolies réserves qui permirent de traverser la sécheresse. C'est la fourmi qui mangeait la première, puis la souris, puis le lapin, enfin le renard. On ne sut jamais ce que devint le lion. On sait juste aujourd'hui que dans un petit coin de savane, vivent en harmonie la fourmi, la souris, le lapin et le renard.

 

   

 

 

 

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commentaires

L
<br /> Bonjour Charlotte,<br /> je suis d'accord avec toi. Comment tu la finirais cette histoire ?<br /> Bonne soirée<br /> J<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Que ton conte est d'actualité...J'ai aimé son déroulement...aurais aimé une autre fin pour assouvir une autre faim, l'espoir, la confiance...<br /> Merci Jacques, infiniment.<br /> <br /> <br />
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